Je comprends pleinement les difficultés et les inquiétudes de nos agriculteurs. La profession traverse une crise profonde, marquée par la chute des revenus, la volatilité des marchés, la concurrence déloyale de certains produits étrangers et la pression croissante des aléas climatiques. Beaucoup vivent une précarité économique inacceptable, aggravée par des contraintes administratives qui compliquent leur quotidien.
Face à ces défis, il est indispensable d’apporter des réponses structurelles, d’accompagner la diversification des exploitations et d’assurer un revenu digne à celles et ceux qui nourrissent la nation. Mais ces réponses doivent s’inscrire dans une vision d’avenir, qui ne sacrifie pas notre environnement ni la santé publique.
Or, la proposition de loi Duplomb va à l’encontre de cette exigence.
Sous couvert de « lever les contraintes », elle prévoit de revenir en arrière sur des avancées cruciales, notamment en réautorisant l’acétamipride, un néonicotinoïde interdit en France depuis 2018 en raison de ses effets néfastes sur les pollinisateurs, la santé humaine et la chaîne alimentaire.
Ce texte adapte la réglementation à un modèle agricole intensif et dépassé, qui a montré ses limites face aux enjeux climatiques, sanitaires et sociaux. Il fragilise l’indépendance des agences sanitaires, ouvre la porte à l’influence des lobbies agro-industriels, et facilite la multiplication des mégabassines et des élevages industriels, aggravant la pression sur l’eau et la biodiversité.
Je m’oppose donc fermement à cette proposition de loi, qui ne répond ni aux véritables besoins des agriculteurs ni aux attentes de la société. Elle ne garantit ni des prix rémunérateurs, ni une meilleure répartition de la valeur, ni un accompagnement vers des pratiques durables. Elle enferme notre agriculture dans un modèle intensif qui a montré ses limites, accentue la dépendance aux intrants et à la volatilité des marchés mondiaux, aggrave les inégalités et fragilise durablement notre souveraineté alimentaire.
Pour ma part, je défends au contraire un modèle agricole vertueux, certes qui nécessite des mesures de simplification, mais qui est fondé sur l’agroécologie, la réduction des pesticides, la préservation des ressources naturelles et la juste rémunération du travail de nos agriculteurs. Ce modèle est la seule voie d’avenir pour concilier la préservation de notre puissance agricole, la souveraineté alimentaire de notre pays et la protection de notre planète.
Dans cette perspective, le rôle de l’Union européenne est central.
La Politique Agricole Commune, les accords commerciaux et les normes européennes structurent profondément notre agriculture, tant en matière de soutien financier que de standards environnementaux et sanitaires.
En tant que première puissance agricole de l’Union, la France doit être moteur pour tirer l’Europe vers le haut, en défendant une harmonisation ambitieuse des règles. C’est à cette échelle que nous pourrons garantir la compétitivité de nos exploitations, valoriser nos productions, lutter contre la concurrence déloyale et bâtir une souveraineté alimentaire durable, fondée sur la qualité, la sécurité et la transition écologique.